À 39 ans, face à un cancer du col de l’utérus agressif, on m’a administré un traitement lourd : chimio/radio concomitantes assorties de 5 jours de curiethérapie. Ce protocole éprouvant a duré 6 mois et il m’a sauvé la vie. Mais j’ai mis 3 ans à récupérer des effets secondaires sévères, grâce au soutien de mes proches, mais également en construisant pas à pas une véritable alliance thérapeutique associant soignants et approches complémentaires.
Pour mieux gérer douleurs, anxiété et contrariétés, j’ai été aidée par une onco-psychologue, une sophrologue ainsi que par l’équipe douleur de mon centre de soins (incluant des séances d’auriculothérapie et d’hypnose).
Sur le plan physique, j’ai eu la chance de trouver 2 kinés extraordinaires : Axelle grâce à qui j’ai récupéré toute ma mobilité et Coralie qui me suit sur le plan périnéal (exercices de relâchement du périnée, utilisation de dilatateurs vaginaux et técarthérapie pour gagner en souplesse sur les tissus fibrosés). En complément, j’ai participé à plusieurs programmes d’activité physique adaptée avec la CAMI (2 séances hebdomadaires en visio) ainsi qu’à des séances de yoga. J’y ai acquis de très bonnes bases pour mettre en place une routine de mobilité que je pratique au quotidien et qui m’apporte bien-être et sérénité !
En parallèle, pour me réapproprier mon corps et mon intimité après ces traitements très invasifs, j’ai bénéficié d’un précieux accompagnement par une socio-esthéticienne ainsi qu’une onco-sexologue. Grâce à leurs conseils, j’ai pu mettre en place des routines de soin intime, en cohérence avec mon parcours thérapeutique et ma ménopause.
J’ai également trouvé de nombreuses réponses à mes questions auprès d’associations de lutte contre le cancer et de patients (LCC, Jurisanté, MRC, Imagyn).
J’ai aujourd’hui 46 ans, je profite de la vie avec mon amoureux et je contribue avec bonheur, en tant que patiente partenaire, à rendre moins tabous les cancers gynecos ainsi que d’améliorer l’information apportée aux patientes sur les solutions existantes ! :)
Senselia : Bonjour Yohanna, pour commencer, pourrais-tu te présenter en quelques mots ? Pour quel cancer as tu été prise en charge et quels traitements as-tu reçu ? Quel âge avais-tu au moment du diagnostic ?
Yohanna : Bonjour, je m’appelle Yohanna, j’ai 45 ans. Il y a 4 ans à l’âge de 41 ans, on m’a découvert un cancer du col de l’utérus. Après un curage ganglionnaire, j’ai eu de la curiethérapie pendant 5 jours et une opération chirurgicale appelée colpo-hystérectomie élargie (on m’a retiré l’utérus, le col de l’utérus, les trompes, les ovaires et la partie haute du vagin).
Senselia : Comment as-tu vécu les traitements ?
Yohanna : Lorsqu’on m’a annoncé que j’avais un cancer, le choc, l’incompréhension et la peur m’ont envahi. J’avais le sentiment de perdre le contrôle sur ce qui m’arrivait. J’ai essayé de ne pas trop me poser de questions et prendre les nouvelles et les traitements étape par étape.
Les traitements ont été très fatigants avec la vie familiale à gérer, même si j’ai été très bien entourée.
Avant la curiethérapie, j’ai eu une consultation avec une infirmière qui m’a montré, sur photo, le dispositif intra-utérin en m’expliquant que je serai allongée 5 jours complets et que j’aurai 2 séances de radiation par jour. J’étais confiante car à aucun moment elle ne m’a parlé de quelques difficultés et effets secondaires.
Nous étions encore en période de covid et je n’ai donc pas pu bénéficier de visites. Ces 5 jours ont donc été très longs pour moi. Mon mental a été mis à rude épreuve. Les appels en visio de mes enfants m’ont encouragé et donné de la force. J’ai également été très bien entourée par l’équipe médicale. Les infirmières ont été très présentes. Elles venaient discuter avec moi et m’ont permis de gérer au mieux la douleur provoquer par le dispositif intra-utérin (sécheresse vaginale)
Par contre, l’après a été beaucoup plus compliqué car je n’étais pas préparé aux effets secondaires de la curiethérapie sur le vagin. On m’a simplement remis un document sur les dilatateurs vaginaux sans explication. J’ai donc été obligée de me débrouiller seule en allant les acheter sur internet sans explication quant à leur utilisation. J’ai trouvé ça très violent de se retrouver seule sans préparation et sans conseils.
L’opération quant à elle s’est bien passée. Le chirurgien gynécologue m’avait bien expliqué le déroulement. Cependant, là encore, les effets secondaires n’ont pas été assez évoqués en amont.
Senselia : Et la sexualité dans tout ca ?
Yohanna : Alors là, l’après traitement sur ce sujet à été très compliqué pour moi. Certes mes traitements étaient terminés et il n’y avait plus de trace du cancer mais J’ai eu l’impression de me retrouver seule à la fin de mes traitements avec un vagin asséché, fibrosé par la curiethérapie et plus court par la chirurgie à 41 ans !!
Après la curiethérapie, le médecin m’a dit de reprendre les rapports 15 jours après pour éviter que le vagin se fibrose. Mais je n’avais pas du tout la tête à ça et j’avais trop mal.
Je me retrouvais à 41 ans à ne plus pouvoir avoir un rapport sexuel sans douleurs. Je me suis sentie perdue, seule, avec la peur de ne plus jamais pouvoir retrouver du plaisir alors que la vie intime fait, pour moi, partie de la qualité de vie d’une femme et d’un homme.
Heureusement, j’ai réussi à en parler à mon gynécologue, qui m’a orienté vers une gynécologue sexologue. Grâce à ses nombreux conseils (utilisation de crèmes, rééducation avec les dilatateurs vaginaux…), j’ai réussi à retrouver une vie sexuelle. Elle est peut-être un peu différente par rapport à avant, mais tout aussi épanouissante.
Senselia : Aurais tu des conseils à donner aux femmes qui vont débuter le même type de parcours de soins? Des choses qui ont bien fonctionné pour toi ou au contraire que tu aurais fait différemment ?
Yohanna : Pendant la curiethérapie, je conseillerai d’apporter un kit « bien-être » composé d’écouteurs, de livres, de musique, une tablette, des friandises, des podcasts…tout ce qui peut vous faire du bien et peut être utilisé allonger. N’hésitez pas non plus à solliciter la visite d’une socio-esthéticienne ou d’un(e) psychologue si c’est possible. Je regrette pour ma part de ne pas avoir osé demander leur intervention, car cela m’aurait aidé je pense.
Après la curiethérapie, la rééducation par l’utilisation de dilatateurs vaginaux est essentielle pour retrouver du confort, se réapproprier son corps en douceur.
Tout au long de vos traitements, n’hésitez pas à poser des questions aux médecins. Je conseille de noter vos questions au moment où elles vous viennent pour ne pas les oublier. On a tendance avec le stress, les effets des traitements à oublier assez vite les choses. Il n’y a pas de questions bêtes et il n’y a rien de pire que de se retrouver seule face à ses interrogations une fois rentrées chez nous !
Enfin, si vous le pouvez, échanger avec des personnes qui sont passées par les mêmes traitements. La curiethérapie est un traitement peu connu par les personnes qui nous entourent et même par les médecins généralistes. Aussi, nous pouvons très vite être effrayées par ce qui nous attend.
Senselia : Un petit mot pour terminer ?
Yohanna : Nous avons toutes et tous en nous une force que nous ne soupçonnons pas, tant que nous n’avons pas vécu ce genre d’épreuve. Il est important d’être à l’écoute de nos besoins, de les exprimer tout au long de notre parcours de soins car avant d’être des malades, nous sommes des FEMMES !
" Une semaine avant la curiethérapie , on te demande de suivre un régime particulier, c'est-à-dire de ne pas manger de fibres et de boire beaucoup d'eau. Mon corps n'acceptait pas beaucoup d'eau, donc j'ai trouvé des astuces sous forme de sirops et de tisanes, beaucoup de tisanes. Avant d'entrer dans la salle de curiethérapie, il faut suivre un traitement pour éviter d'avoir des résidus, c'est-à-dire ne pas avoir de selles. On te donne un produit laxatif à boire 48 heures avant.
Tu dois t'épiler et te raser complètement la zone intime, car c'est là que l'opération sera effectuée pendant que tu es anesthésiée. Comme pour la plupart des anesthésies, tu dois être à jeun la veille.
Le jour de l'opération, on te met ton appareillage, qui consiste en des mèches en métal. Chaque mèche correspond à un endroit où ils vont irradier directement à l'intérieur de ton col de l'utérus ou de ton utérus, pour impacter les autres organes autour, le moins possible. Dans mon cas, j'en avais peu (2) car ma tumeur était déjà plus petite.
Après cela, on te remonte dans ta chambre en position allongée sur le dos, les jambes légèrement écartées. Tu restes dans cette position en permanence, mais tu peux te redresser jusqu'à 30%. Si tu as besoin d'aide pour te mettre sur le côté, tu appelles une aide-soignante qui viendra te redresser et te faire des massages pour soulager le dos et les crampes aux jambes, surtout le deuxième jour. Tu as une sonde urinaire.
Pendant ces trois jours, j'avais des séances de radiothérapie de 10 minutes le matin et le soir. Cela consistait à brancher des éléments sur mon appareillage, qui injectaient des ondes de radiothérapie sur ma tumeur. Bien sûr on avait le droit d'avoir des anti-douleurs pendant toute la durée de la curiethérapie, des massages régulièrement. Pour ma part j'avais des grosses douleurs dès qu'on touchait ma sonde urinaire.
Au réveil, nous avions le droit à un petit-déjeuner sans fibres (Ex : café, biscotte au beurre et gelée). Pour la toilette, j'utilisais un gant et du savon pour nettoyer mon visage, mes bras, tout le haut du corps.
La nuit était pour moi plus difficile. J'étais tour à tour prise de chaleur, de froid et de douleurs aiguës. Heureusement, grâce à la patience d'une infirmière de nuit exceptionnelle, qui intervenait toutes les 2 ou 3 heures sur ma demande, j'ai pu passer quelques heures correctes chaque nuit.
Ce qui est intéressant pendant ce cheminement, tu ressens le besoin de concentration psychologique et un détachement total de communication avec ton entourage, comme si tu voulais les préserver de ta douleurs. Pour ma part c’était ça. Je dois avouer que j'ai énormément pleuré arrivée à mi-chemin. Ma psychologue est venue me rendre visite et j'ai enfin pu exprimer verbalement ma souffrance.
Lorsque ce fameux jour est arrivé, j'étais dans un état d'épuisement, mais tellement heureuse d'en finir avec cette étape. Merci les filles !
Lorsque je suis descendue au bloc pour me faire enlever mon appareillage, je me suis dit que j'arrivais enfin au terme de cette montagne que j'ai grimpée depuis le début, avec ses hauts et ses bas. Une lutte contre cette tumeur qui a mis mon corps à l'épreuve. Le retrait de toutes les mèches, sondes et autres s'est bien passé. Mon oncologue les a retirés délicatement, me prévenant étape par étape de ce qu'elle faisait. Cela m'a rassuré.Une fois l'appareillage retiré, me voilà remontée dans ma chambre pour faire les tests avant la sortie.
Eh oui, après trois jours alités dans la même position sans bouger, le test de se lever doucement, de se mettre debout, d'aller aux toilettes en présence d'une infirmière est primordial pour sortir. Elle m'a pris la tension, regardé en position debout si je n'avais pas de problèmes d'étourdissements, m'a fait faire quelques pas et a donc validé ma sortie. J'avoue que j'étais très fatiguée et je marchais très doucement parce que c'était quand même douloureux. Un VSL est venue me chercher dans ma chambre, je suis donc rentrée chez moi.
Une fois chez moi, je me suis rendue compte avec mes enfants en bas âge que ça allait être compliqué pour eux comme pour moi de les prendre dans mes bras et de m'occuper d'eux. Les enfants sont des éponges, tu à beau mettre ton armure de super maman ils ressente ta fragilité et ta douleur. Je tenais à peine debout et savais qu’ils voudraient me sauter dans les bras pour sentir le cœur de leur maman battre, surtout à leurs âges.
Je pleurais de ne pas pouvoir les réconforter, mais savais qu’il fallait que je me repose physiquement un maximum. Mon ex conjoint a donc décidé d'appeler mes parents pour venir me chercher et rester quelques jours pour que je puisse récupérer après la curiethérapie. Mes petits bouts ont bien compris, je leur avais expliqué que maman avait besoin de se reposer parce qu'elle avait un gros bobo au ventre.
Tout s'est très bien passé pendant ces trois Jours.
J'avoue qu'avec toute cette convalescence, ma famille, mon entourage, les médecins, les infirmiers, les aides-soignantes et toutes ces équipes qui m'ont entourés, accompagnés et soutenue, je n'aurais jamais pu vivre de manière aussi positive cette épreuve du cancer qui n'est malheureusement pas assez mise en avant.
J'ai pris la décision, avec mon médecin traitant, d'entreprendre une cure thermale gynécologique. Après tous ces événements, j'étais très affaiblie physiquement et mentalement. Il était nécessaire pour moi de me reconstruire en tant que femme, compte tenu de toutes les épreuves que j'avais traversées. J'avais besoin d'une déconnexion totale avec ma famille et mes amis.
Je suis partie à Saint-Jean-Luz dans les Pyrénées, non loin de Lourdes, pour une cure thermale de vingt-et-un jours. J'ai découvert que l'air de la montagne avait un pouvoir d'apaisement et de remise en confiance incroyable. Le but de cette cure était d'aider à la cicatrisation interne, de me détendre et de reprendre une activité physique légère, notamment de la randonnée. Les bains avec une canule étaient destinés à hydrater l'intérieur du vagin pour éviter une sécheresse et favoriser une cicatrisation plus rapide. Mon médecin gynécologue spécialiste avait introduit des mèches pour décompresser mon vagin, ce qui n'était pas très agréable mais nécessaire.
Je souhaite m'adresser à toutes ces femmes atteintes d'un cancer gynécologique : vous n'êtes pas seules. Un organisme associatif appelé IMAGYN m'a énormément aidée et continue encore de le faire. Des rencontres, des webconférences, des échanges par messagerie et par mail, bref, une multitude d'aides sous toutes ces formes.
Il est important de se soutenir mutuellement, de partager nos expériences et de trouver du réconfort dans ces moments difficiles. N'oubliez jamais que vous êtes fortes et que vous pouvez surmonter cette épreuve.
Pour mon cas, je suis bien suivie, mes enfants et mon conjoint aussi, et je continue de demander de l'aide dans mes démarches, que ce soit auprès d'un psychologue, d'un sexologue, dès que possible, pour mon couple et surtout en tant que femme.
Il est essentiel de prendre soin de notre bien-être mental et émotionnel, ainsi que de notre vie de couple et famille, afin de trouver un équilibre et de continuer à avancer malgré les épreuves.
J'ai choisi de me battre et d'écouter mon corps, qui m'a poussé à prendre soin de moi et à affronter mon cancer du col de l'utérus. Ce cancer a été un signal clair pour moi : il me disait que je devais aussi prendre soin de moi.
Après avoir donné naissance à trois enfants en bonne santé, il était temps pour moi de me poser et de m'écouter.
Chacun a sa propre vision de la vie, mais mon message est clair : prenez soin de vous. Je m'appelle Bénédicte et j'ai surmonté un cancer du col de l'uterus."

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